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Noël coûte moins cher qu’auparavant

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Par David Descôteaux.

Lorsque Noël approche, la consommation et le pouvoir d’achat sont des thèmes qui font régulièrement les manchettes. Sur ce sujet, on entend souvent dire que « tout coûte plus cher » ou que « notre pouvoir d’achat stagne ».

Qu’en est-il vraiment ?

Les discussions portant sur le pouvoir d’achat mettent souvent l’accent sur l’évolution des salaires ou celle des prix. Or, ce genre de comparaison occulte un facteur important qui fait en sorte que notre capacité à se procurer des biens augmente constamment : la productivité. En effet, lorsqu’on évalue le pouvoir d’achat en mesurant le coût des biens et services en temps de travail nécessaire pour se les procurer, le portrait change considérablement. On constate alors une grande différence entre ce que nous pouvons consommer aujourd’hui par rapport à il y a une trentaine d’années.

Pour illustrer cette réalité souvent oubliée, nous avons comparé les prix en 2018 d’un panier de biens qu’on pourrait offrir aujourd’hui en cadeau à Noël avec les prix de ces mêmes biens en 19841. Afin de bien mesurer le pouvoir d’achat, nous avons également tenu compte du salaire horaire du travailleur canadien moyen en 1984 et en 20182. Ainsi, nous avons pu établir combien de temps quelqu’un devait travailler à l’époque pour se payer une console de jeu vidéo ou un téléviseur, par exemple, et combien de temps ce quelqu’un doit travailler encore aujourd’hui pour se procurer ce même bien ou l’équivalent le plus proche. La comparaison ne se veut pas scientifique en soi, mais elle reste éclairante.

Le temps, c’est de l’argent

Par exemple, pour s’offrir un téléviseur couleur 20 pouces à tube cathodique, un salarié devait travailler 49 heures en 1984, soit plus d’une semaine de travail. En 2018, un travailleur peut s’acheter une télé couleur 20 pouces à écran plat en passant neuf heures au bureau ou à l’usine, soit à peine plus d’une journée de travail. (Il peut aussi commander ce même téléviseur sur Internet et s’épargner le déplacement !)

Un téléphone sans fil pour la maison nécessitait presque dix heures de travail en 1984. En 2018, un salarié ne doit travailler que deux heures et quart pour acquérir un produit similaire, dont les capacités sont pourtant supérieures. Dans la même veine, une calculatrice scientifique Sharp coûtait, en temps de travail, quatre fois plus au salarié de 1984 qu’elle en coûte au salarié de 2018. Et la calculatrice scientifique de l’époque avait 61 fonctions… contre 640 pour celle d’aujourd’hui !

Même des biens de consommation sans composante technologique importante représentent des aubaines aujourd’hui, quoique les écarts soient parfois moins spectaculaires. Par exemple, un petit congélateur (4 m3) nécessitait 25 heures de travail en 1984, comparativement à 16 heures aujourd’hui. Le temps de travail nécessaire pour se procurer une scie circulaire (4,5 heures en 1984 contre 2,5 heures en 2018) ou un fer à repasser (3,5 heures en 1984 contre 2 heures en 2018) a aussi fortement diminué. Pour certains biens, le coût en heures aujourd’hui est toutefois presque le même qu’en 1984. Par exemple, un ensemble Lego de 335 pièces coûtait 2,9 heures de travail en 1984, alors qu’un autre ensemble comptant le même nombre de pièces coûte 2,7 heures de travail aujourd’hui.

Ainsi, en reconstruisant un panier de biens que l’on pourrait retrouver sous le sapin de Noël d’une famille (voir le Tableau 1), on constate que les biens du panier de 2018 coûtent environ moitié moins que ceux de 1984, mesuré en heures travaillées – l’écart moyen étant de 47 %3.

De plus, dans la grande majorité des cas, les biens d’aujourd’hui sont de meilleure qualité et offrent un plus grand nombre de fonctionnalités. La plupart sont aussi moins énergivores et moins polluants que leurs prédécesseurs équivalents (on peut penser par exemple à certains appareils électroménagers ou aux automobiles). Il se peut que certains appareils modernes aient une durée de vie moindre, mais lorsqu’on tient compte de leurs coûts relativement faibles par rapport à leurs devanciers de 1984, les économies générées compensent généralement, et amplement, la durée de vie moindre, s’il y a lieu.

Pourquoi notre niveau de vie augmente-t-il ?

Si le coût en temps de travail de biens de consommation typiques a eu tendance à baisser avec le temps, c’est principalement en raison de la hausse générale de la productivité. Les investissements en capital au fil du temps par les entreprises, de même que l’innovation technologique, permettent en effet d’augmenter grandement la productivité tant des machines que celle des travailleurs, ces derniers disposant ainsi d’outils plus performants4.

À ceci s’ajoute la croissance du capital humain, soit les connaissances et compétences que les travailleurs acquièrent par l’éducation, la formation et l’expérience, qui haussent la valeur du travail et, par effet d’entraînement, le salaire moyen5. La concurrence et les gains d’efficience qu’a entraîné le commerce international ont également participé au phénomène6.

D’ailleurs, même en ignorant le calcul en temps de travail, les prix ajustés pour l’inflation de plusieurs de ces biens sont plus bas qu’il y a une génération7. Le résultat final est que le travailleur moyen canadien améliore avec le temps son pouvoir d’achat réel par heure travaillée.

On a parfois l’impression que le salarié moyen peine à joindre les deux bouts, et c’est vrai à certains égards ; le prix de l’immobilier, par exemple, peut représenter un défi dans certaines villes. Cela ne doit pas faire oublier qu’à bien d’autres égards, ce travailleur n’a jamais été aussi riche, et que cet enrichissement est dû en grande partie à un environnement économique favorable aux échanges commerciaux et à l’investissement. Ce serait un beau cadeau de Noël de la part de nos politiciens de continuer à encourager cette diffusion des bénéfices de la croissance économique.

Sur le web

  1. Nous avons constitué à cette fin un panier pour une famille, composé de cadeaux destinés à des enfants et des adultes. Pour montrer l’effet de l’augmentation du pouvoir d’achat indépendamment de l’arrivée de nouvelles technologiques, nous avons choisi un nombre important de produits non technologiques.
  2. L’année 1984 est la deuxième série la plus lointaine où les données sur la rémunération horaire moyenne des travailleurs canadiens (tirés de l’EERH de Statistique Canada) sont disponibles pour l’ensemble des secteurs. Les données concernent les salariés rémunérés à l’heure (temps plein et partiel) et n’incluent pas le temps supplémentaire. Cette même année permet aussi de comparer avec les prix affichés dans le catalogue Distribution aux consommateurs 1984-1985, disponible sur le site Catalogues Québec.
  3. Nous avons fait le choix de simplement additionner tous les écarts pour en faire ensuite une moyenne non pondérée, de façon à ce qu’un fer à repasser compte autant dans le calcul qu’un ordinateur iMac. L’économie aurait été encore plus grande si nous avions pondéré les résultats en fonction du prix des biens : en 1984, le salarié moyen devait consacrer trois fois et demie plus d’heures de travail qu’aujourd’hui pour acquérir le panier au complet.
  4. Statistique Canada, Tableau 36-10-0208-01 : Productivité multifactorielle, valeur ajoutée, facteur capital et facteur travail dans le secteur agrégé des entreprises et ses principaux sous-secteurs, selon des industries. Consulté le 30 novembre 2018.
  5. N. Gregory Mankiw, Germain Belzile et Benoît Pépin, Principes de macroéconomie, 2e édition, Modulo, 2014, p. 140-141.
  6. Mathieu Bédard, « ALÉNA : les critiques de Donald Trump ne sont pas fondées », Le Point, IEDM, juillet 2016.
  7. Steven Horwitz, « Inequality, Mobility, and Being Poor in America », Social Philosophy and Policy, vol. 31 no 2, printemps 2015, p. 81. Bien que l’étude citée porte sur les États-Unis, le phénomène à l’œuvre est, de façon générale, le même au Canada.

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